Fugazi est un groupe de post-hardcore originaire de Washington, D.C. et formé en 1987. Le nom du groupe est issu de l’acronyme utilisé par les GI durant la guerre du Viêt Nam, lorsqu’ils se trouvaient dans une très mauvaise situation — littéralement : « Fucked Up, Got Ambushed, Zipped In », « Suis foutu, pris en embuscade, peux plus sortir ».
Fugazi est l’un des rares exemples de groupes qui réussirent à être connus tout en restant fidèles aux labels indépendants d’enregistrement et de distribution, suivant l’esprit de l’éthique DIY du punk. Le groupe a rarement fait payer plus de 5 ou 10$ l’entrée de ses concerts aux États-Unis et a toujours voulu qu’ils soient ouverts à tous les âges. Ce fut MacKaye en particulier qui insista sur ce point, se rappelant avoir été rejeté de clubs pendant son adolescence. Fugazi a également toujours maintenu le prix de ses albums autour de 10$ et n’a jamais vendu de produits dérivés comme des t-shirts ou des affiches. Tous les albums du groupe sont sortis sur Dischord Records, co-géré par Ian MacKaye et l’ancien batteur de Minor Threat, Jeff Nelson.
En 1988 sortit leur premier EP : Fugazi, qui contient plusieurs chansons populaires auprès des fans, dont « Waiting Room ». Le groupe a ensuite été rejoint par Guy Picciotto, autre ancien de Rites Of Spring. Au départ, Picciotto chantait uniquement mais, rapidement, il s’est mis à jouer de la guitare au sein du quatuor. Fugazi a développé un son expérimental, unique, qui, plus tard, a influencé des groupes de punk rock et de grunge. Il a marié des éléments de noise avec une musique syncopée originale tout en la pimentant à l’occasion d’influences reggae et dub. De plus, dans leur expérimentation, l’imagination remarquable de MacKaye et Picciotto, dans la synchronisation de leurs guitares, a souvent rendu désuète la notion traditionnelle de guitare principale et de guitare d’accompagnement. Ils ont également incorporé dans leurs mélodies des accords et des progressions musicales étrangement inhabituelles et dissonantes, rappelant parfois l’harmonie musicale de Tom Verlaine et Richard Lloyd du groupe Television, filtrée à travers une sensibilité hardcore.
D’ordinaire, les paroles de MacKaye sont plus directes, et sonnent comme des hymnes, avec des slogans et des refrains très marqués. Celles de Picciotto sont plus abstraites, avec une approche plus oblique. Lally a aussi participé à l’écriture de quelques chansons. Les paroles de Fugazi ont la particularité de mettre fortement l’accent sur les émotions. Ce style a conduit des critiques à qualifier cette musique de post-hardcore ou d’emo, en ce qu’elle est perçue comme une progression et une réaction par rapport au hardcore.
Fugazi rentrera dans la légende pour un truc débile, lors d’un concert à Philadelphie, en 1988. Les organisateurs du concert se souviennent.
« Quand nous avons demandé à Ian MacKaye, début 1988, si Fugazi accepterait de jouer un concert à Philadelphie, Ian a accepté avec enthousiasme, et il n’y a pas vraiment eu de négociation.
Comme c’était un concert au bénéfice d’un refuge pour sans-abris à Philadelphie, il n’a jamais été question d’argent. Ian a simplement demandé que l’affiche ne comporte qu’un nombre limité de groupes, et que l’un d’eux soit Scram, un groupe local de Philly. Le concert serait ouvert à tous les âges, et l’entrée serait à 5 $. Il a aussi précisé que le matériel de promotion ne devait pas mentionner « ex-Minor Threat » — mais que Dischord Records, ça allait.
C’était notre premier concert, donc on a choisi un lieu qui avait déjà accueilli des concerts punk tout public : un gymnase de YMCA dans le nord-est de Philly. (On a dit au responsable du YMCA qu’il s’agissait d’une « soirée dansante pour ados ».)
Le lieu était nul.
Le gymnase, c’était essentiellement une énorme boîte en parpaings. L’acoustique de la salle était donc pourrie. Et il n’y avait peut-être même pas de climatisation. La scène était louée, et vraiment fragile — j’étais inquiet qu’un musicien se casse le cou.
Mais les gars de Fugazi ne se sont pas plaints une seule fois — même quand l’électricité a sauté en plein milieu de leur set. Ils ont donné un concert incroyablement énergique et passionné.
Scram a TOUT DÉFONCÉ avec leur mélange génial de punk, funk et reggae.
Le groupe hardcore mélodique du New Jersey, The Corrupted Ones, a très bien assuré en première partie.
Mais tout le monde se souvient du moment où Guy Picciotto, de Fugazi, s’est hissé à travers le panier de basket. Il a ensuite chanté « Glue Man » suspendu la tête en bas. Cette explosion d’énergie complètement folle de Guy, improvisée sur le moment, est devenue carrément iconique. Elle a été immortalisée dans le documentaire « Instrument » de Jem Cohen sur Fugazi, et la photo de Sean Gustillo est apparue partout sur Internet (et sur des t-shirts, des tatouages, voire même des décorations de Noël !). Pourtant, à ce moment-là, tout ce à quoi je pensais, c’était : « Mec, j’espère que ce panier de basket va pas plier. Je vais devoir le rembourser ! »
Ce fut le seul concert qu’on a organisé, et on a décidé de prendre notre retraite au sommet de notre gloire.

Un génie a voulu reproduire la scène iconique, mais le succès ne fut pas au rendez-vous. N’est pas Guy Picciotto qui veut.